De nos jours, bien communiquer est une compétence incontournable. Tout d’abord, elle est transversale et touche absolument tous les domaines de notre vie. Mais surtout les moyens contemporains de communication font que nous avons tendance à être en lien continu avec les autres (via les réseaux sociaux notamment). Par conséquent, notre capacité à échanger, à exprimer nos émotions ainsi que nos idées de façon saine pour soi comme pour les autres devient capitale pour notre bien-être. C’est justement l’objet de la communication affirmée.

    Vous êtes un particulier ? On vous appelle


    1. Qu’est-ce que la communication affirmée ?

    La communication affirmée est une compétence sociale qui s’exprime au cours d’une conversation avec une ou plusieurs autres personnes et qui vise à faire entendre de manière authentique et directe ses émotions, ses pensées, ses idées tout en respectant et tenant réellement compte de celles des autres. Ce dernier point est central car la communication affirmée implique de verbaliser pleinement ses besoins et ses opinions mais jamais au détriment de ceux d’autrui. C’est un point d’équilibre à trouver qui constitue la base de toute relation saine et doit permettre à chacun des interlocuteurs de se sentir écouté, traité de façon respectable, équitable, sous aucun prétexte agressé et, si jamais cela devait être le cas (souvent le fait d’incompréhensions qui peuvent survenir même lorsque l’on a recours à la communication affirmée), en mesure d’exprimer l’éventuel mal-être comme de pouvoir manifester son refus par rapport à une demande.

     

    La communication affirmée s’inscrit dans la perspective plus large de l’affirmation de soi, qui est un mode comportemental de relation à l’autre, soit un ensemble de comportements (dont la communication affirmée) dont le but est de développer des rapports sains, équilibrés et épanouissants avec les personnes que l’on côtoie. Pour représenter au mieux l’affirmation de soi, on utilise le plus souvent l’image de la balance relationnelle. En effet, l’affirmation de soi est caractérisée par la mise en place d’une relation où l’autre et nous-même bénéficions de la même considération, où les besoins de chacun sont pris en compte et mis sur le même plan, traités avec la même importance. En d’autres termes, l’autre pèse le même poids que nous dans la relation sans qu’aucun des deux ne se sente lésé ou négligé.  

     

    Attention toutefois, contrairement à certaines idées reçues, l’affirmation de soi comme la communication affirmée ne sont ni innées ni spontanées. Ce n’est pas un type de personnalité ou une qualité intrinsèque dont on disposerait ou non. C’est un choix individuel, une approche particulière des relations interpersonnelles qui donne lieu à la mise en place de compétences sociales spécifiques et qui doivent encore être mises en œuvre dans les situations d’interactions in fine. On ne parle donc pas de “personne affirmée” mais bien de “comportements affirmés” qui sont appris et peuvent être mobilisés ou non dans les différentes situations d’interaction. Une même personne peut très bien communiquer de façon affirmée dans un cadre précis et ne pas le faire dans d’autres. 

    La volonté de l’individu reste donc centrale. Cette dernière dépend, d’une part, de la personnalité, des aptitudes et des représentations quant aux rapports humains qui tendent à favoriser un type de communication plutôt qu’un autre. Il faut également prendre en compte l’état émotionnel dans lequel l’individu se trouve avant, pendant et même après l’interaction. En effet, les émotions sont au cœur du processus de communication. La présence de l’autre est à l’origine de différentes émotions positives comme négatives et c’est la raison pour laquelle il peut être parfois difficile d’échanger sereinement.

     

    2. L’anticipation du conflit au centre de la communication

    Effectuer une demande, donner son opinion, évoquer une situation qui vous déplait dans l’optique de faire changer les choses, exprimer un refus ou son opposition à une décision, recevoir des compliments tout comme en donner sont des exemples d’interactions quotidiennes mais qui peuvent pourtant être assez mal vécues. La raison d’un tel phénomène ? Elle provient de l’anticipation d’un conflit ou à minima de la contradiction de l’avis exprimé et des réactions émotionnelles associées. Communiquer signifie que l’on a une ou plusieurs autres personnes qui nous font face et qui peuvent alors agir en véritables obstacles à l’obtention de ce que l’on souhaite. Réciproquement, on peut soi-même se percevoir comme l’obstacle aux envies d’autrui. Dans une certaine mesure, communiquer c’est s’exposer et exposer l’autre à la frustration, à l’incompréhension, à la violence, etc. En somme, les situations de communication peuvent être perçues comme une forme d’arène ou d’affrontement.

     

    L’anticipation de ce conflit et les issues négatives qu’on a tendance à se représenter amènent souvent les personnes à adopter des attitudes de communication dysfonctionnelles

    L’inhibition

    Il s’agit d’un mode de communication qui se caractérise par une grande passivité dans les rapports humains. C’est l’incapacité, dans une interaction, à exprimer ses émotions et donner son avis à partir du moment où il y a une possibilité, même infime, d’entrer en contradiction avec son interlocuteur. L’individu préfère dans ce cas s’autocensurer par peur du conflit et des conséquences désastreuses, souvent disproportionnées, qu’il imagine. C’est donc un véritable excès d’anxiété qui empêche de trouver les mots, altère le ton de la voix, la posture ainsi que tout ce que l’on associe généralement au langage non-verbal. Ce fonctionnement est dysfonctionnel par essence car il génère une grande souffrance chez l’individu. Ses besoins ne sont pas respectés, passent systématiquement après ceux des autres et la répétition de ce type de situations impacte négativement l’estime de soi.

    L’agressivité

    C’est le comportement diamétralement opposé à celui de l’inhibition. Si la communication inhibée consiste globalement à s’empêcher de s’exprimer, la communication agressive vise, elle,  à  imposer à l’autre ce que l’on veut par la force ou la duperie. Dans ce mode de communication, l’individu ne se soucie pas des conséquences pour l’interlocuteur et exprime ses émotions de manière violente ou dissimulée à des fins de manipulation. Il ne tient pas compte des ressentis des autres ou de leurs besoins tant que les siens sont assouvis. C’est là encore un fonctionnement dysfonctionnel car communiquer agressivement génère un fort ressentiment chez l’autre, dégradant ainsi profondément et rapidement les relations. Si la communication agressive peut permettre occasionnellement de parvenir à ses fins, à terme, elle conduit à l’isolement social et nuit, de ce fait, au bien-être et à la qualité de vie.

    3. Objectif dialogue ! 

    Souvent envisagé et redouté pour ses conséquences relationnelles éventuellement négatives, le conflit est pourtant un passage obligé dans presque toute relation sociale prolongée. Après tout, il ne désigne que l’opposition plus ou moins marquée entre deux points de vue, ce qui est un cas de figure assez fréquent entre deux personnes. 

    De plus, bien qu’à première vue les avis puissent paraître incompatibles voire irréconciliables, les bénéfices de la résolution d’un conflit supplantent largement ses possibles effets négatifs momentanés. En effet, c’est une occasion de mieux se comprendre et d’améliorer la dynamique de relation pour le futur. Mais pour y parvenir, il faut réussir à installer un dialogue authentique capable de faire émerger des solutions qu’on n’aurait pas pu imaginer seul. Un vrai dialogue, ce n’est pas juste une succession d’interventions qui persistent invariablement dans le même sens. C’est au contraire un échange qui doit permettre la décentration, c’est-à-dire une certaine prise de recul vis-à-vis de sa propre opinion afin de pouvoir considérer les choses sous un autre angle – souvent le point de vue de l’interlocuteur mais pas que – sans pour autant trahir ce que l’on ressent. 

    Par ce processus, notre point de vue initial se voit enrichi du discours d’autrui – et réciproquement celui d’autrui du nôtre – ce qui maximise fortement les chances de déboucher sur une issue réellement satisfaisante pour chacun. L’expression efficace, sincère et directe de ce que l’on pense, veut et ressent constitue alors le meilleur moyen d’arriver à de tels résultats.

     

    4. Comment communiquer de manière affirmée ?

    Tout d’abord, la communication affirmée est une compétence qui s’acquiert en s’exerçant dans les situations réelles d’interaction. Il n’existe pas de formule toute faite à utiliser systématiquement. Il faut mobiliser son empathie pour entendre et comprendre l’émotion de l’interlocuteur, être à l’écoute de ses propres ressentis pour pouvoir les mettre en mot dans le respect de l’autre comme de vous-même. Ce n’est pas instinctif mais quelques principes centraux peuvent aider toute personne désireuse d’améliorer sa communication. 

    Prévoir la communication

    L’idée ici n’est pas de supprimer toute spontanéité dans ce que vous dites mais plutôt de bien avoir conscience qu’en fonction des circonstances, un message peut être perçu différemment. De la même manière que vous serez plus ou moins disposé à entendre certaines choses selon le moment de la journée et votre niveau d’activité par exemple, votre interlocuteur pourra être plus ou moins réceptif à ce que vous essayez de lui dire. C’est donc important de prendre cet aspect en compte surtout si vous vous apprêtez à effectuer une demande qui pourrait s’avérer coûteuse à ses yeux. Dans ce cas, vous pouvez notamment le questionner afin qu’il vous dise quel serait le moment le plus propice pour lui pour évoquer ce sujet qui vous importe. 

    Décrire et expliquer la situation problématique

    Là encore, on ne vous demande pas de procéder à une analyse rigoureuse de ce que vous vivez. Cependant, pour que votre interlocuteur puisse vous comprendre, il est important de procéder par étapes, d’avancer progressivement dans votre récit. Vous pouvez par exemple commencer par parler des faits, des éléments objectifs de la façon la plus neutre possible. Il faut surtout réussir à les distinguer de toute interprétation et de tout jugement même si cela peut se révéler très complexe. Ensuite, vous pouvez exposer ce que vous avez compris de sa position ou de ses actes, toujours en précisant qu’il s’agit bien de votre perspective qui ne fait pas figure de vérité générale. La dernière étape est de parler des conséquences de la situation qui vous pose problème. C’est vraiment le moment d’exprimer vos émotions, vos difficultés sans pour autant prendre une posture accusatrice. Bien au contraire, il est nécessaire de garder à l’esprit que vous n’êtes peut-être pas le ou la seule à souffrir de la situation et que la perception de votre interlocuteur pourrait être toute autre. Faire alors preuve d’empathie, équilibrer le négatif avec des messages positifs, remercier l’autre pour son écoute peuvent véritablement faciliter l’échange et augmenter les chances de résolution.

    Formuler explicitement son besoin

    Enfin pour aller au bout du processus, votre prise de parole doit déboucher sur une demande ou une proposition précise. L’affirmation de soi implique que vous assumiez vos émotions, vos besoins et vos idées de façon authentique, directe et respectueuse. Il faut dissiper les incertitudes quant à votre position par une demande claire permettant ainsi à votre interlocuteur d’y répondre favorablement ou non.

    5. Comment travailler la communication affirmée ?

    Savoir communiquer est une compétence essentielle pour tout un chacun de par l’impact très important que la communication peut avoir dans la qualité de la relation aux autres, et ce dans tous les domaines de vie. Bien communiquer influence fortement, par exemple, la proximité que l’on peut avoir avec notre entourage ou bien les rapports au travail et donc l’épanouissement professionnel. Or tout le monde n’est pas à l’aise avec la communication, loin de là ! Les fausses croyances très répandues selon lesquelles certaines personnes seraient naturellement douées pour communiquer et d’autres non incitent généralement à adopter des stratégies d’adaptation qui correspondent à des formes plus ou moins graves d’évitement. Les angoisses associées aux situations d’interaction se renforcent alors, ce qui peut favoriser le développement à terme de troubles anxieux tels que la phobie sociale ou la phobie scolaire pour les plus jeunes, voire même des troubles de l’humeur. De façon plus large, chez les personnes souffrantes de troubles anxieux ou d’addiction, on retrouve souvent un défaut d’affirmation de soi qui participe au maintien du trouble. C’est pour cette raison que les thérapies cognitivo-comportementales (TCC) sont aujourd’hui une méthode thérapeutique extrêmement éprouvée pour travailler efficacement sur l’affirmation de soi.

     

    Gestion des émotions 

    Les émotions et particulièrement certaines angoisses sont au centre de la communication. Les TCC permettent de travailler sur cet aspect en s’intéressant à ces pensées catastrophes dans le cadre de la restructuration cognitive, qui consiste à reprendre les schémas de pensées inadaptés de l’individu. D’autre part, la thérapeute lui apprend des outils pour l’aider à gérer son anxiété comme la relaxation via des exercices de respiration ou encore le système ACARA. L’objectif est là de permettre de retrouver une forme de sérénité dans les situations d’interaction et que les émotions ne le submergent plus.

    Le jeu de rôle comportemental

    L’autre grand axe de l’accompagnement en TCC à l’affirmation de soi est l’exposition. Il s’agit toutefois d’une exposition particulière parce-qu’on parle là de jeu de rôle comportemental. Le plus souvent réalisées en groupe, ce sont des mises en scène les plus réalistes possible qui reprennent les situations du quotidien problématiques car avec une ou plusieurs interactions qui mettent à mal le sujet. Le but est donc, dans un premier temps, de le guider dans l’application des principes de la communication affirmée. Puis, on augmente progressivement la difficulté des mises en scène afin de s’assurer de l’acquisition des compétences de communication dans toutes les situations.

     

    Les thèmes des ateliers peuvent être ainsi très variés. Ils concernent principalement :  

    • Effectuer une demande (se défendre ; réclamer quelque-chose) ;
    • Refuser ;
    • Émettre des critiques ou exprimer une émotion négative ;
    • Recevoir des critiques (justifiées, injustifiées, vagues) ;
    • Gérer l’agressivité et la colère (la sienne et celle des autres) ;
    • Gérer les conflits ;
    • Prendre la parole en public.

    6. La réalité virtuelle et la communication affirmée

    La réalité virtuelle et plus particulièrement les TERV (Thérapie par Exposition à la Réalité Virtuelle) s’inscrivent dans la filiation directe des TCC. On peut donc effectuer le même travail thérapeutique à la différence notable que le recours à la réalité virtuelle permet d’immerger entièrement le patient dans un environnement totalement recréé par ordinateur, qui provoquera les mêmes réactions anxieuses chez l’individu que dans la vie. Par conséquent, les TERV sont particulièrement efficaces dans le développement des techniques de gestion des émotions. Elles présentent aussi l’avantage pratique de ne pas avoir à mobiliser d’autres personnes pour les mises en scène. Elles facilitent, de ce fait, aussi la répétition et donc l’habituation aux situations d’interaction ce qui contribue également à faire redescendre durablement l’inconfort émotionnel ressenti. Néanmoins, les interactions en réalité virtuelle constituent un cadre moins naturel que dans les jeux de rôles comportementaux.  Le groupe offre aussi plus de possibilités d’interactions différentes. Par conséquent, associer TERV et jeux de rôle comportementaux pourrait constituer une modalité d’accompagnement thérapeutique particulièrement intéressante et pertinente.

      Vous êtes un particulier ? On vous appelle