Workaholism or “boulomanie” in French refers to addiction to work. Unlike many other addictions, its symptoms such as presenteeism (being at work even when you shouldn’t be) or over-investment in work are often valued in companies, which makes it more insidious and difficult to treat than most addictive disorders. However, as with all addictive behaviors, it exposes those affected to very significant health risks (hyperstress, burnout, depression).

1. Qu’est-ce que le workaholisme ?

Le workaholisme est un néologisme anglophone né de la contraction entre work – qui signifie travail en anglais – et alcoolisme pour désigner l’addiction au travail en faisant référence à l’addiction à l’alcool beaucoup plus reconnue socialement. Appelée “boulomanie” ou ergomanie en français, il s’agit d’un besoin irrépressible de travailler devenu si fort qu’il constitue un danger pour la santé, le bien-être et les relations sociales

C’est donc une véritable addiction comportementale sans substance (comme c’est le cas avec les jeux d’argent par exemple) qui a pourtant longtemps été perçue positivement dans le monde du travail, notamment. Les salariés workaholiques étaient souvent valorisés par les organisations qui louaient et encourageaient leur implication démesurée. Aujourd’hui, les conséquences néfastes du workaholisme et la souffrance qui en résulte sont beaucoup mieux connues et prises en charge, bien qu’on note toujours un manque de stratégies globales de prévention quant à ce trouble au sein des structures comme au niveau national.

 

2. Quels sont les signes du workaholisme ?

Beaucoup de motifs autres que le workaholisme peuvent expliquer la tendance de certaines personnes à travailler au-delà du raisonnable, comme le besoin d’argent tout simplement. Toutefois, ce qui différencie la personne workaholique des autres, c’est l’établissement d’un rapport compulsif à son travail. Autrement dit, il faut vraiment que de lui-même, l’individu se sente obligé de travailler constamment indépendamment des pressions externes qu’il peut subir. Ce phénomène peut en revanche être la résultante d’une intériorisation de ces pressions et/ou s’expliquer également par certaines prédispositions personnelles qui entrent en interaction avec le vécu du travail, mais la source des conduites addictives est avant tout interne. 

Cette tendance compulsive à travailler se traduit en actes par le fait d’accorder un temps excessif à son travail notamment en comparaison avec le temps alloué aux activités extra-professionnelles telles que les loisirs ou les activités sociales et familiales. Vis-à-vis de cela, de nombreux workaholiques disent vraiment ressentir un besoin incontrôlable de travailler et c’est alors pour eux une vraie nécessité de consacrer le plus de temps possible à leur travail.

L’un des autres indicateurs principaux du workaholisme, c’est l’incapacité de se déconnecter de son travail. Les professionnels workaholiques ne pensent et parlent que de leur travail et ce même en dehors de leur contexte professionnel. De ce fait, il y a un véritable empiètement voire une forme de colonisation du travail sur les autres domaines de vie.

3. Existe-t-il différents types de workaholiques ?

Bien que le workaholisme puisse s’exprimer sous différentes formes en fonction des personnes mais aussi des contextes de travail, il existe plusieurs classifications de travailleurs workaholiques. On en dénote deux principales dans la littérature scientifique. 

La première typologie se caractérise par une approche sous l’angle de la satisfaction au travail. En effet, elle distingue deux types de workaholiques en fonction de la satisfaction qu’ils et elles peuvent tirer de leurs comportements excessifs sur le plan professionnel. On retrouve ainsi : 

  • Les workaholiques enthousiastes qui ressentent un niveau de contrainte très élevé par rapport au reste des travailleurs, démontrent une implication dans leur travail également très supérieure mais se disent épanouis dans leur vie professionnelle. Le problème avec ce type de profil, c’est qu’ils finissent par n’éprouver de la satisfaction que dans leur travail et se désinvestissent ainsi des autres domaines de vie.
  • Les workaholiques compulsifs qui, eux, sont dominés par la contrainte qu’ils s’appliquent. Ils s’obligent à travailler au-delà des exigences organisationnelles et économiques bien que cela ne leur apporte très peu voire aucune satisfaction.

La seconde catégorisation a été établie sur le rapport entre le nombre de projets entamés ramenés à celui des travaux terminés. 4 profils-type de travailleurs workaholiques ressortent : 

  • Workaholique infatigable : travaille littéralement jour et nuit. Il s’engage entièrement dans chaque projet initié avec un pic d’adrénaline qui correspond aux échéances de rendu. Une fois terminé, il se lance directement dans un autre projet n’accordant aucun temps pour d’autres activités éventuelles.
  • Workaholique boulimique : celui-ci est à l’origine de peu de travaux mais veut toujours tout terminer. Par conséquent, son niveau d’activité est fluctuant et c’est surtout à l’approche des dates limites qu’il se met au travail sans relâche. Vu de l’extérieur, le workaholique boulimique semble vouloir éviter le travail, alors qu’en réalité il travaille mentalement de façon obsessionnelle.
  • Workaholique avec déficit d’attention : tend à s’ennuyer rapidement. Par conséquent, il ne cesse de lancer des projets et d’ajouter de nouvelles tâches qu’il ne peut mener à leur terme.
  • Workaholique délecté : est un perfectionniste obsessionnel. Il est profondément anxieux à l’idée que le travail fini ne soit pas parfait et c’est pourquoi il ne s’arrête jamais de travailler. Il a lui aussi beaucoup de mal à terminer ses tâches ce qui impacte très fortement sa productivité.

 

4. Quels sont les facteurs de risque ?

Les causes de l’addiction au travail sont très difficiles à déterminer. C’est un phénomène complexe qui se développe à travers l’histoire personnelle et professionnelle du sujet. Certains éléments constituent néanmoins des facteurs favorisant fortement son apparition. Ils sont de deux ordres : environnementaux et individuels.

  • Facteurs environnementaux

On parle là avant tout de l’organisation de travail. En effet, les entreprises pour lesquelles la culture et le climat sont marqués par une incitation sous différentes formes à la compétition entre les salariés et aux heures supplémentaires seront plus susceptibles de générer du workaholisme parmi leurs employés. De plus, les nouveaux moyens de communication et la numérisation du travail tend à brouiller de plus en plus les frontières entre travail et hors travail. Là encore, les structures qui ne portent pas une attention particulière aux dérives éventuelles sont plus touchées par le workaholisme.

  • Facteurs individuels

En premier lieu, certains types de personnalité sont plus exposés au workaholisme que d’autres. Les études montrent que les personnes particulièrement extraverties et celles avec un rythme d’activités très rapide sont en moyenne beaucoup plus investies dans leur vie professionnelle. Il se peut également que ces comportements addictifs proviennent de tendances obsessionnelles compulsives. Le travail devient alors l’objet de l’obsession qui engendre ensuite le comportement compulsionnel et donc ce besoin incontrôlable de travailler constamment.

Un autre déterminant individuel a été mis en évidence par la recherche, à savoir la présence de certaines croyances irrationnelles. Par exemple, si vous pensez qu’il faut absolument que vous soyez apprécié par les autres ou que vous  soyez le meilleur dans tous les domaines, alors il deviendra vital pour vous que votre travail soit complètement irréprochable. Vous serez alors constamment sous pression à vous imposer une forte exigence de perfection qui sera en fait déliée du travail en lui-même. Ces croyances sont donc à l’origine de comportements dysfonctionnels qui pourront procurer un équilibre momentané et de la satisfaction à très court terme mais engendreront une grande détresse par la suite.

5. Quelles sont les conséquences du workaholisme ?

Les conséquences négatives du workaholisme impactent tous les domaines de vie de la personne workaholique. Son état de santé général, ses rapports avec son entourage et même son travail sont bouleversés par cette addiction.

  • Conséquences sur la santé

Les personnes workaholiques sont en moyenne en moins bonne santé que les autres professionnels. Leur tendance irrationnelle et compulsive à travailler les expose, entre autres, à des niveaux de stress particulièrement élevés. On retrouve ainsi dans cette population de nombreux problèmes digestifs (ballonnements, brûlures gastriques, douleurs abdominales, reflux), des maladies cardiovasculaires (coronaropathies, hypertension artérielle, accidents vasculaires cérébraux)  et Troubles Musculo Squelettiques (TMS). Pour essayer de tenir le rythme, de nombreux professionnels workaholiques se tournent vers la consommation de substances développant ainsi de nouvelles addictions qui contribuent à la détérioration de leur santé.

Sur le plan psychique, l’individu workaholique vit constamment sous pression. Il est en état de stress permanent ce qui provoque des niveaux d’anxiété très importants et expose alors aux symptômes des troubles anxieux comme l’insomnie ou une plus grande irritabilité. Le mode de vie workaholique n’est pas tenable sur la durée et conduit inexorablement à l’épuisement physique et mental. Le workaholisme est, de ce fait, une des causes principales de burnout et peut également mener à une dépression sévère lorsqu’on ne se sent plus du tout en capacité de travailler.

  • Conséquences sociales

Sur le plan social, la personne workaholique perd progressivement toute motivation à s’engager dans des conduites de sociabilité. Elle s’isole de ses amis, abandonne ses loisirs car elle n’arrive pas ou plus à trouver de l’intérêt dans des activités autres que son travail. La vie familiale et amoureuse est donc également très compliquée parce-que totalement désinvestie, ce qui provoque de la souffrance pour l’entourage qui se retrouve souvent dans une incompréhension totale.

  • Conséquences professionnelles

Contrairement aux idées reçues, le surinvestissement et la capacité exceptionnelle de travail des workaholiques ont en fait des effets négatifs sur la performance et la productivité. Le stress permanent ainsi que la dégradation progressive de leur santé font que ces professionnels ne peuvent fonctionner de manière optimale tant sur le plan cognitif qu’émotionnel pour pouvoir répondre aux exigences organisationnelles. Leur attitude se révèle très souvent problématique au sein d’un collectif de travail car ils ont souvent l’obsession de vouloir tout contrôler. Ils sont psychorigides et irritables ce qui tend à générer de la tension et des conflits réguliers.

6. Qui est touché par le workaholisme ?

Le concept de workaholisme est encore relativement nouveau ce qui fait qu’il peut être assez difficile d’évaluer avec précision la population la plus touchée par ce trouble. Cependant, les études montrent pour l’instant que les hommes seraient plus concernés par cette addiction que les femmes. Autre élément : les manageurs et dirigeants seraient les plus susceptibles de développer des conduites excessives au travail notamment le fait de continuer à travailler même une fois la journée finie. 

C’est encore plus complexe de quantifier la part de la population qui souffrirait de cette affection. Une recherche menée dans une entreprise parisienne indique que 12% des salariés seraient workaholiques. Toutefois, ce sont des chiffres à considérer avec prudence compte tenu de la taille réduite de l’échantillon.

7. Comment mesure-t-on le workaholisme ?

Il y a deux principales échelles pour mesurer votre niveau de workaholisme qui sont le WART  (Work Addiction Risk Test) et le DUWAS (Dutch Work Addiction Scale).

  • Le WART

Ce test consiste en une suite de 25 affirmations par rapport auxquelles on doit estimer à quel point elles peuvent s’appliquer à nous, en choisissant entre 4 modalités allant de “Pas du tout vrai” à “Toujours vrai”. Il évalue cinq dimensions :

  • les tendances compulsives à travailler dur ;
  • le besoin de contrôle sur les tâches ;
  • le manque de communication et l’isolement social ;
  • l’impact des résultats du travail sur l’estime de soi ;
  • la totale incapacité à déléguer.

Les scores au-dessus de 67 révèlent normalement une addiction au travail.

  • Le DUWAS

C’est un questionnaire plus court avec 10 items. Il évalue deux dimensions qui sont le travail excessif, soit les comportements problématiques au travail, et le travail compulsif qui correspond au niveau de contrainte interne que ressent l’individu vis-à-vis de son travail. Le sujet workaholique obtiendra des scores élevés en travail excessif et en travail compulsif.

7. Quelles solutions pour lutter contre le workaholisme ?

Le problème central de la prise en charge du workaholisme provient du fait que les personnes workaholiques n’ont presque jamais conscience de l’être. Ce n’est seulement qu’après la survenue d’un burnout ou d’une dépression qu’ils et elles commencent généralement à se questionner sur leur rapport dysfonctionnel au travail. Le burnout spécifiquement apparaît, dans une certaine mesure, comme une sanction des conduites addictives sur le long terme. Pour reprendre la comparaison avec l’alcoolisme, une vie de consommation excessive d’alcool mène souvent à la maladie. La différence, c’est que dans le cas de l’alcool, on sait plus ou moins à quoi l’on s’expose alors que l’on connaît très peu les risques du travail excessif. C’est pourquoi le premier axe de prise en charge relève de la sensibilisation à tous les niveaux pour faciliter les prises de conscience.

  • Vous pouvez vous auto-tester

Ensuite, si vous vous sentez concerné par les symptômes recensés sur cette page, vous pouvez commencer par vous auto-tester avec le WART ou le DUWAS qui sont tous deux disponibles en ligne en version française. Pour rappel, si votre score au WART est supérieur à 67, cela signifie que vous présentez vraisemblablement un risque important de développer une addiction au travail. Pour le DUWAS, vous êtes considéré “workaholique” si votre total dépasse 28.

Dans tous les cas, il est primordial d’essayer de gérer ses émotions et ses pensées afin de regagner plus de contrôle sur vos comportements vis-à-vis de votre travail. Pour ce faire, la relaxation est un très bon outil. Appliquer les règles hygiéno-diététiques favorise également un retour à l’équilibre.

  • Les thérapies d’exposition pour faire face au workaholisme

Toutefois, pour mettre fin durablement aux conduites addictives, il est préférable d’être accompagné par un professionnel. Les thérapies cognitivo-comportementales ont notamment démontré leur efficacité dans le traitement des troubles anxieux, de la dépression et du burnout. Les exercices de restructuration cognitive qu’elles mettent en œuvre sont très adaptés au travail sur les croyances irrationnelles ancrées à l’origine de certaines addictions au travail.

Les thérapies par exposition à la réalité virtuelle (TERV) permettent de travailler encore plus efficacement sur le volet comportemental de l’addiction. En effet, le travail faisant l’objet d’une obsession dans le cas du workaholisme, certaines situations de travail agissent comme des stimuli déclencheurs de votre compulsion à travailler de manière excessive. En étant exposé en réalité virtuelle à ces situations, vous allez progressivement être désensibilisé, ce qui signifie que la réponse émotionnelle responsable de vos conduites inadaptées tendra à disparaître. La réalité virtuelle est aussi un environnement tout indiqué pour s’exercer aux techniques de relaxation, de gestion des émotions qui vous permettront de reprendre pleinement conscience de vos besoins réels et d’enfin pouvoir les écouter.